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"On en vient à devoir priver les parents"... Le cri d'alarme des associations d'aide alimentaire

 Le cri d'alarme des associations d'aide alimentaire DDM - DDM JEAN MICHEL MAZET

En grande difficulté financière, les Restos du cœur ont lancé un appel au secours, dimanche dernier. Des problèmes aussi éprouvés par les autres associations d'aide alimentaire.

Patrice Douret, le président des Restos du cœur a tiré la sonnette d'alarme, dimanche 3 septembre. Face à des difficultés financières, l'association pourrait mettre la clé sous la porte d'ici à trois ans", et 150 000 personnes pourraient être éconduites cet hiver en raison du manque de ressources.

"Nous alertons également depuis de nombreux mois sur l'impact de l'inflation", confirme Laurence Champier, directrice générale de la Fédération des Banques alimentaires. Concrètement, cette hausse des prix s'est notamment traduite par une baisse du nombre de repas que le réseau a pu distribuer en 2022 "en raison de la baisse de notre stock".

"Des personnes qui n'en avaient pas besoin auparavant"

En parallèle, l'association est confrontée à une augmentation de la demande. "De plus en plus de personnes ont recours à l'aide alimentaire et viennent dans nos associations partenaires. +9% sur le premier trimestre 2023. C'est une accélération forte, que l'on constate depuis le début le début de la crise du Covid. C'est +32% si l'on compare avec le 1er trimestre 2020 !" De surcroît, le profil des bénéficiaires est de plus en plus hétérogène. "Des personnes qui ont un emploi et un logement.... Des personnes qui n'en avaient pas besoin auparavant".

La Fédération doit également faire face à une fragilisation de ses approvisionnements. "Aujourd'hui, des Banques alimentaires font déjà le choix de donner moins de produits à des associations afin d'avoir des stocks suffisants pour faire face. En bout de chaîne, il y a donc moins de produits". Et comme les Restos du cœur, l'association doit affronter une hausse de ses dépenses de fonctionnement, dû notamment à l'augmentation des prix de l'énergie. 

"Nous sommes un peu inquiets sur la capacité de mobiliser le grand public à donner alors que tout le monde fait attention à ses courses, se questionne Laurence Champier. On espère que les citoyens continueront d'être généreux".

"La hausse des prix a accru la précarité"

Une situation compliquée, partagée par l'Armée du Salut, à Toulouse. "La hausse des prix a accru la précarité de nombreux Français, affirme aussi Sarah Maboussou, la responsable de l'organisation à Toulouse. La plupart de nos bénéficiaires sont des personnes au RSA, des demandeurs d'asile ou encore des personnes âgées isolées ayant une faible retraite. Et aussi des étudiants".

L'organisation propose trois repas chauds et une distribution de produits alimentaires par semaine. "En un an, nous sommes passés de 16 colis alimentaires à 96 !" déplore la responsable, qui ressent également l'impact de l'inflation sur les donateurs. "La portion de denrées que nous recevions auparavant de la Banque alimentaire ne suffit plus. Mais elle n'est pas en mesure de donner plus".

"On ne peut pas fermer la porte à quelqu'un qui a faim"

Résultat : Sarah Maboussou est obligée de "jongler" sur le budget. "Nous devons répondre à un besoin urgent : celui de permettre à chacun de manger, un besoin élémentaire. On ne peut pas dire à une personne, qui a déjà connu toute une procédure pour arriver jusqu'à nous, qu'on ne peut pas l'aider. On ne peut pas fermer la porte à quelqu'un qui a faim".

Ces derniers temps, l'Armée du Salut de Toulouse est contrainte de réduire les portions. "Par exemple, au lieu de donner 5 yaourts à une famille de 5 personnes, nous n'en donnons que 3. On en vient à devoir priver les parents... Les 2 pots de yaourts 'économisés' seront donnés à une autre famille. Nous essayons de palier les inégalités, mais ce n'est pas évident".

Restos du coeur : 14,5 millions de repas déjà distribués en Occitanie

En Occitanie, l’augmentation du nombre de personnes accueillies par les Restos du coeur s’est accélérée : de 84 000 personnes en 2022, ce sont désormais plus de 100 000 personnes qui ont déjà eu recours à l’aide à ce jour.

Sur le plan alimentaire, l'association avait distribué gratuitement 10,5 millions de repas à cette date en 2022. A la même date en 2023, elle a déjà distribué 4 millions de repas supplémentaires.

Pour la campagne 22-23, 13,5 millions de repas avaient été distribués en Occitanie. Les projections actuelles amènent à un résultat de 17 millions de repas à mars 2024, soit près de 25% de repas supplémentaires. Les Restos achètent près du tiers des repas distribués : ce sont ainsi près de 5 millions de repas qui ont été achetés cette année par l'association dans la région.

Si les Restos du coeur se retrouvent dans l'obligation de réduire le barème d’accès à l’aide alimentaire, cela impactera 10 à 25 000 personnes en Occitanie.