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Les années 2000, le retour de la pauvreté

 1,1 million Selon le Centre d'observation de la société, le nombre de travailleurs pauvres est passé de 900 000 à un 1,1 million entre 2002 et 2011 (+17%).

Dans les années 2000, le débat sur les travailleurs pauvres réapparaît. Alors qu’elle avait diminué régulièrement depuis les années 1970, la pauvreté a cessé de baisser depuis la fin des années 1990. En 2005, le taux de pauvreté augmente, en particulier pour les jeunes, les familles et les actifs. L’emploi ne protège plus de la pauvreté.

Selon la définition des working poors donnée par les États-Unis, au milieu des années 1990, la France compte entre 1,8 million et 3,6 millions de travailleurs pauvres, en fonction des seuils retenus (seuil INSEE ou seuil européen). À la fin des années 1990, le recul du chômage marque une embellie que l’on espère durable. La croissance économique finit par avoir des effets positifs sur l’emploi. Mais la reprise laisse une importante catégorie de population à l’écart, inscrite dans la pauvreté et la précarité et dont les difficultés de logement ou de santé ne sont pas résolues. Il faudra des années pour que la diminution du chômage conduise à un équilibre moins défavorable aux plus pauvres. Le rapport de l’Observatoire national de la pauvreté et des exclusions sociales de 2003 révèle que si le phénomène des travailleurs pauvres s’est estompé entre 1996 et 2001, à partir de 2002, le mouvement s’inverse. Deux éléments d’explications sont apportés par les chercheurs : la modération salariale s’est traduite par une baisse de pouvoir d’achat dans les années 1990 et une politique de maîtrise des prestations sociales dès 1983. La plupart des prestations sociales sont, au mieux, restées indexées sur les prix, tandis que les conditions d’attribution de ces prestations sont devenues plus restrictives. Le second facteur de développement de la pauvreté des travailleurs tient à l’évolution du marché du travail et aux nouvelles formes d’inégalités salariales.

Quatre-vingts pour cent des travailleurs pauvres sont des salariés. La probabilité d’être pauvre s’accroît très nettement au fur et à mesure que le statut d’emploi est précaire. C’est ce que confirme une recherche réalisée en 2006 par le CREDOC. Cette pauvreté s’explique d’une part par la précarité des emplois occupés (temps partiel subi, faible durée du contrat de travail), d’autre part par la faiblesse des rémunérations qui, même complétées par des transferts sociaux, ne permettent pas toujours d’assurer un niveau de vie décent à une famille. Les effets de seuils qui réduisent les minima sociaux contribuent à alimenter la difficulté des travailleurs pauvres et à décourager un retour à l’emploi.

En 2006, la Fédération nationale des associations d’accueil et de réadaptation sociale (Fnars) publie un Livre blanc intitulé Les Exclus de l’emploi et les Travailleurs pauvres, qui commence ainsi :

« Lorsque l’emploi stable est en passe de devenir atypique et que la société française glisse du salariat au “précariat” pour reprendre le terme du sociologue Robert Castel, les plus fragiles et les moins formés sont les premiers à se retrouver aux marges du marché du travail. »

Ce Livre blanc énumère huit pistes de propositions :

- combiner les revenus du travail et ceux de la solidarité ;
- renforcer le financement public des nouveaux contrats aidés ;
- créer un contrat d’insertion unique ;
- évaluer l’insertion par l’activité économique dans sa double dimension insertion sociale/accès à l’emploi ;
- adapter les conventions collectives pour qu’elles tiennent compte des diversités de l’insertion ;
- améliorer la formation ;
- faciliter le passage aux entreprises « classiques » ;
- simplifier l’accès aux financements publics pour les plus petites structures.

Ces propositions recoupent largement celles contenues dans l’engagement national de réduction de la pauvreté.

En 2001, un rapport de la Cour des comptes portant sur le RMI montre la fragilité du dispositif d’insertion qu’il prévoit. Les mesures d’insertion proposées se heurtent au chômage chronique et ont du mal à fonctionner comme un tremplin vers un emploi plus stable. Le législateur renforce au cours du temps la possibilité de cumuler pendant un certain temps les bénéfices du RMI avec les revenus d’un emploi (mécanismes d’intéressement). Mais ce système ne bénéficie qu’à une petite partie des allocataires.