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Gaspillage : les hypermarchés en font des tonnes

Une collecte de la banque alimentaire dans un hypermarché toulousain./Photo DDM archives, Michel Viala

Le 3 février, le Sénat a approuvé le projet de loi de lutte contre le gaspillage alimentaire, obligeant les supermarchés à signer une convention avec une association récupérant et redistribuant les invendus comestibles.

Après avoir été rejeté par le Conseil Constitutionnel pour des raisons de procédure, le projet de loi de lutte contre le gaspillage alimentaire a été adopté par l'Assemblée Nationale puis par le Sénat début février. Aucune date n'a encore été fixée pour les décrets d'application, mais la grande distribution et les associations d'aide alimentaire s'y préparent déjà. Ils négocient actuellement une convention-type, qui pourrait être intégrée aux décrets d'application.

La principale mesure du projet de loi est une obligation pour les magasins ayant une superficie supérieure à 400 m² de signer une convention avec une association caritative, qui doit récupérer les produits comestibles retirés de la vente afin de les redistribuer. Les produits doivent être pris en charge par les associations 48 heures maximum avant la date limite de consommation (DLC), car la distribution de produits ayant dépassé leur DLC est interdite. Les dons seront défiscalisés en fonction de leur quantité. L'obligation de destruction des produits de marque distributeur, auparavant imposée par les producteurs aux enseignes, est supprimée ; afin de réduire le gaspillage. Enfin, la loi introduit une hiérarchie d'actions à mettre en place : «éviter le gaspillage à la source, rediriger les surplus vers la consommation humaine, à défaut vers la consommation animale, et se tourner vers la gestion de déchets, explique Héloïse Gaborel de France Nature Environnement (FNE). Le problème étant de savoir si la hiérarchie sera respectée.»

Parmi les grandes surfaces toulousaines, les avis divergent. Carrefour et Casino, seules enseignes à nous avoir communiqué des informations, expliquent que la lutte contre le gaspillage alimentaire est déjà une préoccupation pour leurs enseignes. Les marchandises arrivant à terme de leur DLC sont récupérées par la banque alimentaire de Toulouse ou les sections locales d'associations telles que le Secours Populaire ou la Croix Rouge. «La loi rend obligatoire une initiative qui existait déjà», confirme Héloïse Gaborel. La préparation en vue de l'entrée en vigueur de la loi est «d'une importance minime» pour ces enseignes. Concernant les coûts logistiques ou de main-d'œuvre causés par la loi : rien ne serait amené à changer à Toulouse, puisque le système est déjà rodé. La pression repose donc sur les associations, qui vont devoir augmenter leurs capacités, ce que confirment Héloïse Gaborel et Annie-France Looses, présidente de la banque alimentaire de Toulouse.


DLC et DDM : quelles différences ?

Les dates présentes sur les produits alimentaires sont de deux types : la date limite de consommation (DLC) et date de durabilité minimale (DDM), anciennement appelée date limite d'utilisation optimale (DLUO). La première est indiquée par la mention «à consommer jusqu'au», et la seconde «à consommer de préférence avant le/avant fin». Les produits comportant une DLC doivent être retirés de la vente une fois la date atteinte. «Les produits frais présentent un risque de désagrégation micro-organique, explique Caroline Seguin, diététicienne-nutritionniste. Il faut éviter d'en consommer. En revanche, les produits avec une DDM sont le plus souvent secs. Il peut y avoir une altération des particularités organoleptiques après la DDM, c'est-à-dire une perte de goût ou de nutriments, mais pas de risque sanitaire.» Les associations de consommateurs UFC-Que choisir et le CLCV dénoncent une dénomination peu claire et des dates fixées par les producteurs ou les interprofessions, et dans de rares cas par arrêté ministériel. Le CLCV préconise des mentions plus claires : «meilleur avant» pour la DLC et «ne pas consommer après» pour la DDM, ce qui est impossible à l'heure actuelle, cette dernière étant imposée par une directive européenne.

Léo Caravagna et Martin Gausseran